1. Introduction
La révolution scientifique et technique à l'oeuvre ces dernières années a induit et induira des changements importants dans les sociétés humaines. Les technologies du vivant, mises au point grâce à l'expérimentation animale, révolutionnent l'agriculture, l'élevage, les modes d'alimentation et la médecine. Cette révolution, liée à la prise de conscience de l'ambivalence du progrès, ont enraîné l'émergence d'une réflexion éthique, qui est à la source du droit national et international. En effet, la puissance économique et politique d'une nation dépend de sa capacité à maîtriser les nouvelles technologies et à exporter son savoir-faire. Il est donc normal que la société cherche à s'organiser, à se doter de règles qui permettent non seulement de développer la valorisation économique de ces technologies, mais aussi à protéger les droits et liberté de l'homme.
Dès le XIX ème siècle, des organisations nationales et internationales de protection des animaux ont développé les problèmes posés par nos rapports à l'animal.
L'actualité de ces dernières années permet d'apprécier l'importance et la complexité de ces questions et les rapports paradoxaux que nous entretenons avec l'animal.
Dans les années 1980, des opérations violentes de commandos ont essayé d'empêcher l'exportation de veaux de Grande Bretagne vers le reste de l'Europe et ont lancé des attaques contre des camions de boucherie. Le Front de libération des animaux (ALF) prône le "sabotage économique" des produits ayant fait l'objet d'une expérimentation ou d'une exploitation animale, allant jusqu'à l'incendie de magasins vendant des fourrures. Barry Horne purge, en Grande Bretagne, une peine de 18 ans de prison pour plusieurs attentats commis en 1994. Celui-ci, pour obtenir la constitution d'une Commission royale sur l'expérimentation animale, a fait une grève de la faim de soixante-huit jours, en décembre 1998. Les membres de l'ALF ont menacé de tuer dix chercheurs et éleveurs britanniques au cas où Barry Horne mourrait au cours de sa grève de la faim. En Allemagne, en décembre 1998, le neurobiologiste Wolf Singer, qui étudie les propriétés électriques du cerveau des primates dans le but de mieux comprendre certaines maladies cérébrales a reçu plusieurs menaces de mort (Le Monde, 24 décembre 1998).
En juin 1996 des organisations de protection de la nature ont mis en place une campagne de presse pour que la Commission Européenne de l'Environnement adopte l'interdiction de tout commerce d'animaux piégés sans respecter les normes de piégeage sans cruauté définis dans la recommandation RCE 3254/91. Un accord dans ce sens a été signé en 1998 entre la CE, le Canada et la Russie (98/142/CE).
L'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), voisine de la maladie de Creutzfeldt-Jacob, maladie neurodégénérative très rare, et les risques de sa transmission à l'homme font la une des journaux et réveille les peurs d'épidémie et la façon de traiter le problème.
Récemment, le retour de loups dans les Vosges puis dans le Mercantour a réveillé de vieilles peurs malgré l'absence de cet animal depuis plusieurs siècles de notre pays.
Dernièrement, le problème de la maîtrise du risque, notamment celui lié à la transposition à l'homme des techniques de clonage (1997) ou celui lié à la production d'rganismes génétiquement modifiés (OGM) s'est posé avec force.
Ces quelques éléments nous rappelle que nous formons avec les animaux une communauté dont nous devons connaître les règles, pour leur bien comme pour le nôtre et qu'il existe donc un indéniable malaise dans la façon dont nous traitons les animaux. Il ne semble pas possible de ne voir dans ce malaise qu'une sensiblerie déplacée qu'il suffirait de rejeter dans l'irrationalité de réactions populaires. Ces réactions intuitives, cette "sensibilité sociale", ont-elles quelque justification? S'émouvoir du sort fait aux animaux est-ce faire indûment obstacle au progrès? Peut-on évaluer l'intérêt de l'expérimentation animale?
Après avoir tenté de définir les termes utilisés, les rapports qui nous lient à l'animal, la place qu'il occupe dans l'organisation des communautés humaines et l'organisation mythique de la terre, nous essayerons de préciser :
- les événements qui motivent nos craintes et nos espoirs,
- les questions qui se posent à la conscience,
- les valeurs qui sous-tendent les partis que nous croyons devoir prendre
- et enfin, comment se forge une opinion éthique et la législation qui en découle, en particulier dans le domaine de l'expérimentation animale.
Ce cours s'inscrit dans le cadre de la réglementation française qui exige des futurs expérimentateurs une formation spéciale (habilitation à pratiquer l'expérimentation animale, HPEA) concernant la connaissance et le respect de l'animal de laboratoire ainsi que leurs responsabilités vis-à-vis de ces animaux.
Questions, suggestions, critiques, informations complémentaires, envoyez un message :
Ramousse